Celle qui sait [Ziusudra 1], Laurence SUHNER

Ambre et Tokalinan sont de retour. La trilogie Quantika proposait une fin ouverte dans laquelle s’est engouffrée Laurence Suhner, neuf ans après la parution de Vestiges, premier tome de la série. Mais attention aux surprises ! Gemma n’est plus. Le monde glacé a laissé la place à Indiga, paradis où les hommes se voient bien venir en masse, pour fuir une Terre polluée. Mais que s’est-il passé ? Et pourquoi les personnages de la trilogie ne sentent-ils pas à leur place sur cette planète bleue ?

Un départ intrigant

J’avais lu les trois romans formant cette trilogie, Vestiges, L’Ouvreur des Chemins et Origines, à leur sortie, c’est à dire, voilà plus de six ans pour le dernier. Autrement dit, l’histoire m’était connue et je l’avais beaucoup appréciée à l’époque, mais les détails étaient bien loin de ma mémoire. Et le début de Celle qui sait n’a rien fait pour me rassurer. J’avais l’impression de tout mélanger. Et, peu à peu, j’ai compris que c’était normal. Ce n’était pas seulement dû à ma mémoire poreuse.

En effet, le moins que l’on puisse dire, c’est que Laurence Suhner sait surprendre son lecteur. Car Gemma, siège de l’action de la trilogie, boule de glace au climat difficile, dangereux pour l’homme, est devenue Indiga, une sorte de paradis tropical avec mer d’azur et températures clémentes (voire un peu trop chaudes pour certains). Et l’humanité a profité de l’aubaine d’une telle planète assez proche de la Terre pour la coloniser. Logique ! On y retrouve les personnages dont nous avions suivi les aventures vertigineuses dans Quantika (ce qui rend sa lecture nécessaire pour vraiment profiter de Celle qui sait). Mais quelque chose ne tourne pas rond : ils sont mal à l’aise, pas bien à leur place. Comme s’ils avaient pris celle de quelqu’un d’autre. Comme s’ils étaient des imposteurs.

Ambre et Tokalinan : la suite

La mise en place de ce nouveau cadre et la compréhension progressive des raisons de cet état de fait (je ne dirai rien de plus pour ne pas gâcher le plaisir) vont prendre une première grosse moitié du roman. Puis vient une deuxième partie très différente, comme d’habitude dans cette œuvre. On y retrouve Ambre Pasquier. C’est à travers ses yeux que l’on vit cette partie de l’histoire. Enceinte de Hazel, elle a suivi Tokalinan et se retrouve seule humaine au milieu du peuple de son ami. Difficile pour elle de tout saisir puisqu’elle n’a pas les capacités physiques de bien comprendre le langage de ses hôtes. Difficile pour elle de s’imaginer accoucher ici, entourée d’êtres dont les bébés sont des œufs déposés dans la nature, pas des bébés grandissant dans un ventre. D’ailleurs, plus son ventre à elle s’arrondit, plus elle est observée avec réserve. Difficile enfin pour elle de savoir comment se faire accepter de tous : les oppositions se font jour et prennent de l’importance au fil des jours.

Une suite de trop ? Non !

Autant le dire, j’étais circonspect quand j’ai appris que Laurence Suhner retournait dans le monde de Quantika. Ce genre de reprise est parfois synonyme d’échec, l’auteur ne sachant se renouveler. Mais rapidement, j’ai compris que ce n’était pas le cas avec Celle qui sait, premier volume d’un diptyque. L’autrice a su, en reprenant les côtés accrocheurs et attachants des premiers romans, renouveler ses habitudes et offrir un récit passionnant. C’est en effet toujours un plaisir de vivre de nouvelles histoires dans un monde déjà connu.

Évidemment, je me suis encore fait surprendre par le changement de ton conséquent entre les deux parties. On passe d’un récit au rythme rapide, aux multiples protagonistes, à, sinon un huis clos, du moins une scène au nombre de personnages plus retreint et avec de plus nombreux passages d’introspection. Mais j’ai rapidement pris le tempo et, de toute façon, les évènements s’accélèrent rapidement jusqu’à la fin pleine de suspens.

Merci à Laurence Suhner (et aux éditions de L’Atalante) pour cette bonne surprise. Celle qui sait mérite largement sa place dans l’univers de Quantika et génère une certaine frustration (classique) à devoir attendre la sortie du deuxième et dernier tome, Celui qui voit à paraître en 2022 ou 2023. J’ai hâte.

Présentation de l’éditeur : — Professeur Faradyne ? Stanislas Arkadi Faradyne ? Stanislas fut pris d’un malaise. Derrière lui étaient plantés les deux énergumènes auxquels il tentait d’échapper depuis ce matin. — Notre commanditaire, monsieur Boubakine, aimerait s’entretenir avec vous. Au sujet de votre propulsion. Après dix ans de répit, le pire de ses cauchemars devenait réalité ! Stanislas n’avait jamais fricoté avec Boubakine, le magnat qui avait financé la colonisation du système AltaMira. Et pour cause : il n’était pas véritablement Faradyne, Le Faradyne, le scientifique de génie qui avait développé la première propulsion warp de l’histoire, permettant l’exode extrasolaire de l’humanité. Il se retourna. Il était acculé. Devant lui, l’océan s’étendait à perte de vue, ponctué des îles Témen et Zuha. Gemma avait bien changé. À tel point que personne, ici, ne l’avait jamais appelée « le joyau de glace étincelant dans la nuit ». Et pour cause, Gemma, la blanche, la froide, n’avait tout simplement jamais existé. Ici, on l’appelait Indiga. La bleue. La confrontation de l’humain avec une forme de pensée différente, remettant en question l’interprétation scientifique et mathématique d’une réalité unique et déterministe, constituait le thème principal de « QuanTika ». « Ziusudra » plonge ses protagonistes dans un univers parallèle. La réalité y est un vaste jardin aux sentiers qui bifurquent…

L’Atalante, collection « La Dentelle du cygne » – 21 octobre 2021 (roman inédit – 560 pages – 25,90 euros)

Merci aux éditions de L’Atalante pour ce SP.

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5 réflexions sur “Celle qui sait [Ziusudra 1], Laurence SUHNER

  1. Cà me fait penser qu’hier j’ai trouvé « Vestiges » grand format en soldes à 2 euros. Si si ..! Je n’ai jamais lu l’auteure (bonne pêche au vu de l’intégrale qui fait plus de 1500 pages, ce qui retient d’y aller un tantinet). Commencé dans la foulée, je me suis heurté à une multitude de noms, de sites géographiques…. etc J’ai failli laisser tomber. Cà se clarifie vite..?

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      1. Le deux puis le trois, si je continue, seront à prix fort (à moins d’avoir beaucoup beaucoup de chances).
        C’est quand même classique qu’un planet opera soit difficile à aborder. Je me souviens de Dune et d’Helliconia, pavés s’il en est, dans lesquels on ne sent bien à l’aise qu’une cent-cinquantaine de pages derrière soi.
        Je vais persévérer. Je la sens bien cette trilogie.

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