Projet Cérébrus, Floriane SOULAS

B-104 : pas très poétique, ce nom. Normal, il s’agit d’un projet scientifique. Et pas n’importe lequel. Un des projets de la dernière chance. Car les ressources s’amenuisent et les chances de survie du groupe auquel appartient Annabelle, la scientifique en charge de cette tentative, voient leur nombre baisser dangereusement. B-104 va-t-il permettre de changer la donne ?

Un compte à rebours

C’est donc une course contre le temps. Le projet poussé par Annabelle, avec B-104, mais aussi B-206, est en concurrence avec d’autres pistes. Or, les résultats ne sont pas suffisamment probants. Et les ennemis de cette théorie veulent faire couper les financements. Dans un futur très proche. Cela entraîne la jeune chercheuse à dépasser un peu le protocole. Elle va motiver davantage ses sujets en entrant en contact avec eux : « Ses théories sur l’apprentissage des intelligences par contact se vérifient. » En effet, quand Annabelle va jouer ou interagir avec B-104, ce sujet d’expérience voit sa courbe de progrès s’infléchir de façon nette. Ce qu’il faut pour amener un avantage à ses idées et permettre de continuer à lui allouer des ressources que d’autres réclamaient. Mais, car il y aura un mais, tout ne va pas se dérouler comme on aurait pu l’espérer. Jusqu’à la révélation finale.

Nouvelle à chute

Car « Projet Cérébrus » se rapproche de ce qu’on appelle une nouvelle à chute. On apprend progressivement des informations qui apportent un changement de point de vue (bien vu, mais prévisible) dans les derniers moments. Et cela donne une autre dimension à la lecture. Et cela amène à une réflexion sur les êtres vivants, leurs différences, leurs buts et ce qu’ils sont prêts à faire pour survivre. Le texte est bref, mais éclairant et, s’il n’a pas révolutionné ma façon de penser, il a conforté une partie de mes réflexions à propos des « intelligences artificielles » et de ce qui les accompagne.

La science en accusée ?

Après la lecture du long et dense Tonnerre après les ruines, la découverte de ces quelques pages est surprenante. Surtout que le cadre n’a aucun rapport, ni même le genre. Cependant, on retrouve le même pessimisme devant la nature de certains êtres vivants. Et par-dessus tout, la même défiance vis-à-vis de certains scientifiques qui placent tout dans leur recherche, au détriment du vivant. Tout est objet et ce qui passe entre les mains de ces personnes n’est rien de plus qu’un cobaye. Qu’il soit inanimé ou pensant, ce n’est que de la chair à canon. Et ce côté sans pitié revient dans les deux œuvres. Il faudra que je vérifie si c’est un thème encore présent dans d’autres récits de Floriane Soulas.

Échouer pour mieux apprendre, c’est ainsi que tout fonctionne, que les neurones créent les bonnes liaisons, que l’intelligence se développe et grandit.

Cette nouvelle a été publiée de façon indépendante dans le cadre de la très intéressante collection numérique d’ActuSF, « Le club de la nouvelle ». Malheureusement, avec les déboires récents de la maison d’édition, les textes ne sont plus disponibles. Heureusement, ce texte de Floriane Soulas reste lisible dans l’anthologie Par delà l’horizon, dirigée par Sébastien Guillot et parue en 2021 chez le même éditeur (actuellement en redémarrage). Car il m’a offert un agréable (et court) moment de détente et une occasion de continuer à réfléchir au monde qui m’entoure.

Présentation de l’éditeur : Dans le Consortium interplanétaire, la course au progrès est lancée. La scientifique Annabelle est proche d’atteindre des résultats avec le sujet B-104, qui doit l’aider à comprendre ce qui fait un cerveau parfait. Quand une scientifique concurrente annonce que leurs recherches sont dans l’impasse, car la création d’une intelligence absolue est impossible, le projet Cérébrus menace de fermer pour éviter l’épuisement des ressources terriennes. Mais Annabelle s’acharne, au point d’interférer avec B-104…

ActuSF, collection « Club de la nouvelle » – 6 février 2023 (novella inédite – 41 pages – Numérique : 1,99 euros)

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